Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     CHIEN     
FEW II-1 canis
CHIEN, subst. masc.
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À chair de chien sauce de loup V. chair

 

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À mauvais chien queue lui vient : A malvais chien queue luy vient. (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 573).

 

Rem. Morawski 76 : A mauvés chien coe li vient.

 

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Amour de cour est amour de chien V. amour1

 

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À tel chien tel os : Et puiz vient au cas: que, le lundi que fu XIIIJe de juillet, l'Université ala, assemblée de toutes ses facultez et nations, en pelerinage solonelment pour la paix de l'Eglise, santé du Roy et biens de terre à Saincte Katerine, où furent premierement petis enfans estudians assailizin primo ordine et puiz autres indifferaument par les gens de messire Charles de Savoisy, en l'ostel duquel se retournerent et d'où estoient issus, et là furent par lui receptez, aidez, confortez, montez et armez pour faire lesdiz cruelx crimez, quel merveille, à tel pot, tel cuiller, à tel chien, tel os. (BAYE, I, 1400-1410, 100).

 

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Charrue de chiens vaut peu V. charrue

 

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Celui-là a langue de chien, qui aboye le bon et le mauvais : Et Thulles nous revault compter : La voix des chiens devons doubter, C'est a dire, se l'entens bien, Ceulx qui abayent comme chien : Car chiens abaye tout a fais, Ainsi le bon com le malvais. Doncquez a cil langue de chien Qui abaye a mal et en bien, Qui dist vilenye et laideur, Aussi du bon, com du pieur. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 101).

 

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Chien battu ressaillit le passage : Lëonet, pour quoy attens tant ? Encor t'en iras repentant. L'en voit par trop dissimuler Aulcuns de lor bien reculer, Car ly felons par fiereté Fait au trop souffrant malvaiseté, Mais rebellion vainc oultrage : Chiens batus resault le passage. (Pastor. B., c.1422-1425, 178).

 

Rem. DI STEF. 166a, chien.

 

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Chien dangereux sans marande se couche : Chien dangereux sans marande se couche. (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 578).

 

Rem. Morawski 381 : Chien dangereus sans marande se couche.

 

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Chien en cuisine ne demande pas son pareil "Chacun défend ce qui est à lui, ou qu'il croit être à lui" : ...celi ne vouloit ne convoitoit avec li nul comaingnon son pareil, maiz mettoit continuelment a descort le dit monseigneur l'empereur avec sez autres barons et ses sugiez - si come il est dit communement : "Chien en cuisine son pareil ne desire" - et si faisoit tant que touz les autres le vouloient deposer (VIGNAY, Théod. Paléol. K., c.1333-1350, 109). ...car l'en dist communement que chien en cuisine ne demande point son compaignon. (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 71). Chascun d'entente fine Du sien veult estre sire : Jamais chien en cuisine Son pareil ne desire. (Prov. rimes F.M., c.1485-1490, 59).

 

Rem. Morawski : Chiens en cuisine son per n'i desirre. Hassell 72, C150 ; DI STEF. 166b, chien.

 

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Chien qu'on nage "qu'on met à l'eau" en lieu de paie, quand il est passé il aboye : Si ne say que tu li demandes ; Qu'elle a acompli tes demandes Et fait plus que tu ne voloies De ce que tu li requeroies. Mais chien qu'on nage, en lieu de paie, Quant il est passez, il abaie. Biaus dous amis, einsi fais tu, Et tout ce ne vaut un festu, Car il n'est chose si perdue Com bonté qui n'est congneüe. (MACH., R. Fort., c.1341, 62).

 

Rem. Morawski 2282 : Tant a qui chien nage ; Hassell 73, C153 ; DI STEF. 165b, chien.

 

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Chien retourne à son vomi pour manger ce qu'il a vomi V. vomir

 

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Chuigne ("cigogne"), heron et chien ce que vomit résume ("reprend") V. vomir

 

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De chien rabi il n'y a point longue chasse : Une aultre estoille estrange et fort barbee, Felle, enflambee et par trop venimeuse, Qui contre ung ray aprés qui chascun bee Se est rebarbee et qui Liege a robbee, Paix destourbee et troublé Rin et Meuse, Par sa fumeuse influence orguilleuse, Fort perilleuse, est chute en terre basse : De chien raby n'y a point longue chasse (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 221).

 

Rem. Hassell 73, C157 ; DI STEF. 166c, chien.

 

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De chien rabi mauvaise est la morsure : (LA CHAIR répondant au POISSON) De chiens rabis mauvaise est la morsure. Se le poisson a l'ennemy vaincu, Qui murdrisoit humaine creature, Il doibt avoir honneste sepulture ; Sy fay je moy, qui sans lance ou escu Ay triumphé sus le deable locu, Disciplinant mon corps dru et souvent. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 638).

 

Rem. Hassell 74, C174 ; DI STEF. 166c, chien.

 

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Deux chiens sont mauvais devant un seul os : N'a gaires que je m'en aloie Pour querir mon esbatement O deux levriers que moult amoye, Nourriz d'un let ; mais en alant, Treuvent ung os qu'ilz vont rungant, Dont entr'eulx mut trop grans rios, Et se combatent durement : Deux chiens sont mauvais a un os. (DESCH., Oeuvres R., t.7, c.1370-1407, 133).

 

Rem. Morawski 609 : Dui chiens [ne peuent] a ung os ; Hassell 74, C175 ; DI STEF. 165b, chien.

 

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(D'oiseaux, de chiens, d'armes et d'amours), pour un plaisir/une joie, cent/ mille douleurs V. douleur

 

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En lit de chien ne quiers point d'oing : En lit de chien ne querés oint. (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 581). En lit de chien ne quiers point d'oint. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 194).

 

Rem. Morawski 666 : En lit a chien ne quer(e) ja sayn.

 

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Folie fait envahir le chien sur son fumier V. fumier

 

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Homme, oiseau, cheval et chien, s'il ne travaille, ne vaut rien V. travailler

 

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Joie de vieux chien est en cor V. joie

 

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Il faut avoir doute ("peur") de réveiller le chien qui dort : Quiconques aime vivre en paix, Garde soy de ramentevoir Murmuracions ou forfais Par quoy se puist noise esmouvoir, Car nul ne doit jamais vouloir Division mettre ou discort, Mais a toute heure doubte avoir De resveillier le chien qui dort. (Prov. rimes F.M., c.1485-1490, 71).

 

Rem. Morawski 879 : Il fait mal esveillier le chien qui dort et 1387 : N'esveilliez pas lou chien qui dort ; DI STEF.165c, chien.

 

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Il n'est aboi que de vieux chien. V. aboi

 

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Il n'est pas bon de prendre le bien de ses enfans pour le vouloir donner aux chiens V. enfant

 

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Il ne faut pas se fier en chien affaité si on désire demeurer en cour : Ne se fye en chien affaitié Qui en court demourer desire ; Ung chascun y est enhettié A espier, veoir et dire ; Car sy soubtillement escrire Ne porras, q'ung plus soubtil oeul En blanc papier ne face lire Ce que tu cuides savoir seul. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 39).

 

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Le chien couard aboie toujours : [Le duc au roitelet] Si tu as le coeur aussy bault Que tu as la langue legiere, Prens ton rohart et ton corbault Et fiers comme ung fort locquebault Sus ceux qui rompent ta lisiere ; Tu saulx de faviere en cossiere Et vas muchant de haye en haye : Le couart chien tousjours abaye. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 651).

 

Rem. Hassell 73, C156 ; DI STEF. 166c, chien.

 

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Le chien entre au moulin sous l'ombre de l'âne : Soubz l'ombre d'asne entre chien en molin. (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 598).

 

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Les chiens prennent mouche ("s'irritent"), quand on châtie les chats : Or ay mestier de vous, dame sainte Marie, Moult tost seray vaincus, se n'ay de vous aye. Se j'ai vo fil et vous, j'ai boine compagnie, Car mi kien prendent mouskes, quant mes cas je castie. (GILLES LE MUISIT, Poésies K., t.2, c.1347-1353, 196).

 

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Mauvais chien ne trouve où mordre : Mal chien ne trouve ou mordre. (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 587).

 

Rem. Morawski 1204 : Mauvés chiens ne trueve ou mordre.

 

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Nature fait le chien tracer V. nature

 

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Nul ne jette son lard aux chiens V. lard

 

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On n'apprivoise pas le chien en lui faisant mal : Faire despit, dommaige et desplaisir, Injure, annuy et toute moquerie, En lieu commun, sanz cause, et ce desir Continuer en toute seignourie A personne qui a esté nourrie En franc vouloir, et sanz li faire bien, Fait estrangier ["fait quitter"] le lieu qui le detrie : Par faire mal n'aprivois'on pas chien ! (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 281). ...mais l'en dit que pour estre compere à chien l'en n'en doit point porter maindre baston. (Lettres Ch. VIII, P., t.2, 1488, 125).

 

Rem. Hassell 73, 165.

 

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On ne vit onques chiens enragés aboyer : Je leur doi, quoy ? Voir dire ; se leur vorrai payer. Une clike poet-on, che dist-on, assayer. On ne vit onques kiens esragés abayer : En tous temps se fait boin de mentir délayer. (GILLES LE MUISIT, Poésies K., t.1, c.1347-1353, 31).

 

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Pour être compère à chien, on ne doit pas porter le moindre bâton : ...mais l'en dit que pour estre compere à chien l'en n'en doit point porter maindre baston. (Lettres Ch. VIII, P., t.2, 1488, 125).

 

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Pour huer les chiens on ne prend pas les loups : Sire, dist Berfuné qui moult estoit viseux ["habile, rusé"], Pour cose que donnés, ne meubles ne cateux, Q'a l'escolle n'alés ja n'en sarez deux neux, Car pour huer les kiens ne prent on point les leux ! Qui veult che jeu aprendre il fault estre songneux (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 289).

 

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Quand le chien chie/pisse, le loup s'en va au bois : Entrementres que le chien chie le lou va au boys (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 581). ...il n'est tel, quant gens vont courre en pays, que de frapper sur les enseignes, car tout va au gaing et ne demeurre que peu de gens à l'escalle. Mais je n'en ay peu estre creu ; et failloit attendre Gaultier et Guillaume à venir, et, tandiz que le chien chye, le loup s'en va au boys. (BUEIL, II, 1461-1466, 93). Qui bien se veult vengier D'ung tresgrant maliffice, Tout a coup sans targier Doit excercer l'office. S'il est pesant et nice, Tout ne vault ung tournoix, Car tendis que chien pisse, Le loup s'enfuit au bois. (Prov. rimes F.M., c.1485-1490, 42).

 

Rem. Morawski 2286 : Tant come le chin chie, s'en vet le leu a bois ; Hassell 74, C169 ; DI STEF. 167a, chien.

 

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Qui aime son chien, connaît son bien : La .XLVIIJe. euvangille La dist une autre vielle : Quoy que devant soit dit, qui aime son chien, congnoist son bien. Qui tue son chat, il tue son mal. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 129).

 

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Qui m'aime, aussi mon chien. "Quand on aime une personne, on aime tout ce qui lui appartient" : Qui m'aime, aussi mon chien. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 197).

 

Rem. Morawski : Qui m'aime et mon chien ; Hassell 34, A67 ; DI STEF. 12c, aimer.

 

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Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage : Qui le chien voeilt ocirre, tuer, et méhaignier, Le rage le met seure (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 326). Qui le kien voelt honnir Le rage lui met seure, pour lui faire morir. (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 340). Qui son chien veult tuer lui met la rage Assus (CHR. PIZ., Cent ball. amant dame C., c.1409-1410, 125). ...des ce qu'il meschiet aux chetiz, on leur met sus que c'est par leurs dessertes, comme cellui qui son chien veult tuer et pour couleur de son fait lui met sus la rage. (CHART., Q. inv., 1422, 37). Puis sa mort [de Madame d'Autriche] sont povres gens hutinés, Tauxés, tanés, pourjectés (...) : Qui hait son chien luy met le raige sus. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 175).

 

Rem. Morawski 2146 : Qui son chien viaut tuer la rage li met sus ; Hassell 74, C168 ; DI STEF. 166b, chien.

 

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[P. réf. à la Bible, Prov. XXVI, 11] Le chien retourne à son vomissement. "Retomber dans son ancien péché" : ...ceulx qui se retournent ainsy legierement a leur malvaise vie come "les chiens a leur vomissement" (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 729-730). Assez fait ceste parolle a noter, mais plus a doubter, pour ce que vexacion et travail doit l'entendement esclarcir et le sentement accroistre, et, ou le rebours est, c'est signifiance de cuers endurcis et de voulenté obstinee, quant après l'adversité ne vient aux hommes cognoissance des ochoisons et des offenses qui les ont a telz meschiefs asserviz, ains retournent des qu'ilz se sentent quelque peu deschargiez a leurs premieres acoustumances comme le chien a son vomissement. (CHART., Q. inv., 1422, 50).

 

Rem. Hassell 73, C155 ; DI STEF. 166b, chien.

 

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Chien retourne à son vomi pour manger ce qu'il a vomi : ...chien, certes, bien dire l'ose, Quant il puet trouver la charoigne, Tellement s'en enffle la loigne Et en boute tant en son corps que par la gueule le met hors, Maiz il retourne a son vomit Pour mengier ce qu'il a vomit, Ne n'est pueur, si cum je cuide, Comm'est de chien quant il se vuide. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 310).

 

Rem. DI STEF. 166b, chien.

 

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Tel en jouant son chien entice, qui fera tant qu'il le mordra : Tel en jouant son chien entince Qui fera tant qu'il le mordra. (ALECIS, Faintes monde P.P., c.1460, 99).

 

Rem. Cf. aussi Morawski 348 : Chascuns chiens qui abaie ne mort pas, 624 : Du sourfeit paist len les chiens ("On nourrit les chiens avec du surplus"), 711 : Es chiens tuer congnoist len les foulx, 1532 : On ne vi vieill chien mener en landon ("avec entrave"), 1698 : Pour soy garde le chien la loge, 1888 : Qui de chien fait son compere n'emporte ja maindre baston, 1786 : Qui a chien done son pain tost l'a mors en la main, 2237 : Se chien fout, si l'achate il, 2252 : Se l'os est dur, le chien est ennoyeux, 2292 : Tant doit len blandir le chin que len soit passé, 2358 : Tel huche le chien es brebis qui ne le peut retraire, 2365 : Tel paist le chien de son pain qui le mort à la main, 2374 : Teus s'enbat comme chiens qui vit come hon, 2472 : Vieill chien est mal à metre en lien.

V. aussi aboi, aboyer
 

Lexique de proverbes Pierre Cromer


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